vendredi 27 février 2015

La Galine 2007, domaine La Combe Blanche, rouge, Minervois La Livinière, Languedoc

Guy Vanlancker est un des nombreux belges qui a décidé de s'offrir un changement de trajectoire sous un ciel plus clément dans le sud de la France. Prof il y a plus de 30 ans chez nous, il s'installe dans sa cave au coeur du village de La Livinière, au Nord-Est de Carcassonne. Toujours à la recherche de nouvelles idées, on trouve dans sa gamme aux prix doux un 100% Cinsault, un 100% Pinot Noir, ou encore un 100% Tempranillo, sans oublier son blanc de Roussanne.

Cette "Galine" est composée de Syrah majoritaire, soutenu par le trio Grenache/Carignan/Cinsault. Il faudra plusieurs heures pour que cette bouteille sorte d'un sommeil profond. Peu loquace de prime abord, le nez va s'épanouir peu à peu alors que la bouche gourmande laisse déjà présager de bons moments lors de l'ouverture. On trouvera des notes évoluées de type sous-bois, champignons, un peu de truffes même. Et à l'agitation, de jolis fruits noirs (framboise) et autres fruits secs entreront dans la danse. L'élevage sous chêne, pourtant d'une durée de 18 mois dans des barriques anciennes, se fait très discret.
L'attaque montre une acidité bien distillée typique des crus languedociens bien orchestrés. Les notes de terre humide étant presque les seules à s'exprimer au départ, j'ai brièvement pensé à un très léger souci de bouchon, mais il n'en est rien heureusement. Les tanins sont relativement fins, pas trop nombreux, bien à leur place. Il en va de même pour l'alcool, même si il se montre plus présent en finale, sans excès malgré les 14 voire 14,5% affichés. Parlons-en de ce finish, assez long et harmonieux sur une tonalité fruitée, beaucoup de gourmandise en fin de bouche.
Un vin plaisant, agréable à boire, un bon compromis entre finesse et puissance. Je pense qu'il était temps d'ouvrir ce 2007, toutefois. Sans être sur le déclin, il me semble qu'il n'en est pas très loin. Et si j'ai l'occasion un jour de découvrir les autres curiosités du domaine, je n'hésiterai pas longtemps.

Pour en trouvez, voyez du côté de ROGER RUWET à Seraing, le champion des vins du quotidien à prix mini: 0498 72 60 70, roger.vins@base.be, peut-être en a-t-il encore.

Sinon, le 2010 est apparemment disponible dans les magasins Auchan.

Une visite au domaine est également une bonne alternative pour aller chercher en sus un peu de soleil, en voici le site internet.

PS: Ça m'a échappé, et suite à une recherche de dernière minute avant de poster l'article, j'ai trouvé d'autres cuvées de ce vigneron chez Popsss, qui se spécialise justement dans les vignerons belges, in & out of our land! J'aurai d'autres pépites dégotées chez Popsss à vous présenter. Boutique à découvrir!

Ma note globale: 85/100

lundi 23 février 2015

Ode au Narince (2/3): Kavaklidere Ancyra Narince 2012, blanc, Turquie

Kavaklidere, c'est un peu le "Torres" turc. Fondée en 1929, cette maison a acquis au fil du temps toute une série de vignobles disséminés dans 7 régions du pays pour un total de 645 hectares en 2014. Pas moins de 55 vins différents sont produits sous cette bannière, il faudrait presque un salon tout entier pour déguster l'ensemble! Les vins de la série "Ancyra", ancien nom de la ville d'Ankara, sont les intermédiaires entre les vins d'entrée de gamme et les vins "Premium" de ce producteur qui travaille évidemment autant avec les cépages locaux qu'avec les internationaux.

Hum, le moins que je puisse dire, c'est que ce vin est aux antipodes du premier. Je suis assez surpris parce que j'ai du mal à leur trouver une caractéristique commune hormis beaucoup de générosité et des nuances d'amertume fruitée dans la finale. Le nez fait voyager en se déclinant sur toute une série de fruits tropicaux: mangue, passion, ananas... pas mal d'agrumes (pamplemousse) également. En fait, ça me fait penser à certaines boissons type "Oasis" ou "Tropico" chez nous, le sucre en moins. ;-) C'est très engageant. En bouche, pas de perlant cette fois mais on a quelque chose de plus vif, l'acidité est bien plus marquée et l'ensemble est plus léger, comme un sauvignon sans son côté herbacé. Ça glisse en tout cas très facilement, et les 13% d'alcool sont parfaitement embarqués.

Là où le Narince de Kayra impressionne par son assurance et sa force tranquille, celui de Kavaklidere est plus canaille et impétueux. Pour ma part, je n'ai pas envie de choisir mon camp, les deux styles me parlent et ce sont des vins très bien faits tous les deux. J'estime toutefois que le Kayra a un petit plus en ce qui concerne le potentiel de garde et sur la longueur de sa finale. N'empêche, ce serait un beau match pour l'équipe de Quitou.com!

Le Kavaklidere est probablement encore plus adapté pour l'apéro, et je le destinerais davantage aux fruits de mer qu'aux nobles poissons. On peut se l'offrir pour une pièce de plus, 9,90 EUR chez Gourient.

Ma note globale: 87/100, pas très original mais je me vois mal les départager tant ces deux flacons visent des objectifs différents. En tout cas, j'attends le troisième, celui de Vinkara, au tournant! :-)

vendredi 20 février 2015

Ode au Narince (1/3): Kayra Terra Narince 2012, blanc, Turquie

Avec cet article, nous entamons une série qui nous entraînera dans un périple au coeur des vins turcs. Nous allons tout d'abord comparer trois vins blancs basés sur le cépage Narince.

Pour avoir passé quelques séjours en vacances dans ce pays, j'ai pu me rendre compte sur place que la qualité était au rendez-vous, propulsée à l'aide de cépages autochtones dignes d'intérêt, mais qu'il est encore assez compliqué de se procurer sur place des flacons fiables et à des prix corrects en tant que touriste mal informé. J'ai encore le souvenir de petites superettes non-climatisées où trainaient des bouteilles plus douteuses les unes que les autres, entre étiquettes rafistolées et muselets abîmés. Mais la chance m'a parfois souri, et cela a suffit pour aiguiser ma curiosité. Si des maisons telles que Kavaklidere ou Doluca sont installées depuis de nombreuses années et fournissent assez bien à l'export, de jeunes établissements audacieux tentent de se faire une place au soleil. Et c'est grâce à cette providentielle boutique allemande, Gourient, que j'ai pu me procurer une série de flacons afin de continuer l'exploration des trésors liquides turcs confortablement installé à la maison.

Entrons sans plus attendre dans le vif du sujet avec le premier blanc en provenance de la maison Kayra dont les installations se trouvent dans la province d'Elazig en Anatolie, sous la supervision de l'oenologue américain Daniel O'Donnell qui avoue qu'il y a encore tout à découvrir parmi la foultitude de cépages locaux. Le cépage Narince est mon petit chouchou en ce qui concerne les blancs. Il se plait bien au contact des barriques, mais les trois quilles que je vais vous décrire n'ont connu que les cuves, afin de permettre une expression pure de ce cépage qui le mérite bien.

Le nez est très séducteur d'emblée, vraiment plaisant. La pomme verte prend les commandes, suivie de prêt par d'autres fruits blancs, des fleurs et une légère dimension minérale. Je n'y trouve pas d'arôme rare, mais l'ensemble est très cohérent. On pourrait bien sûr penser à du Chardonnay de climat chaud avec une telle aromatique, mais la bouche me fait davantage penser à du Verdicchio, cépage ayant la cote en Italie, dans les Marches. Il y a un perlant presqu'imperceptible qui amène sa part de fraîcheur, mais c'est plutôt l'onctuosité qui prévaut. L'acidité est là, mais en retrait. Si il y en avait davantage, je pense que ce vin serait une véritable bombe, parce que la bouche est opulente, une belle concentration des arômes perçus à l'olfaction donne lieu à un vin qui prend de la place autour du palais, mais sans aucune vulgarité. La finale me réchauffe juste ce qu'il faut, et elle est d'une longueur épatante. 12,8% d'alcool, et ça lui va parfaitement bien. Longue finale donc, aux accents fruités, avec une amertume toute légère qui ajoute du sérieux à l'édifice. C'est propre, belle bouteille, et pour 8,90 EUR, voire même 7,50 EUR en promo chez GOurient en ce moment, je vous assure qu'il y a de la matière!

Ce n'est pas complexe, mais ce n'est pas simpliste non plus, on est vraiment entre les deux ce qui fait qu'il sera un partenaire généreux pour l'apéro, et même si c'est un accord classique de chez classique, il embellira un beau poisson, juste grillé. Les deux Narince suivants apporteront-ils autant de satisfaction?

Ma note globale: 87/100

jeudi 12 février 2015

Château Haut-Bailly 2010, rouge, Pessac-Léognan, cru classé de Graves

Est-il bien nécessaire de vous présenter cette propriété star de Léognan? 30 hectares d'un seul tenant, fournissant uniquement en rouge, répartie sur un premier et un second vin pour une production atteignant sans mal 150 000 quilles. Une petite visite du <a href="http://www.chateau-haut-bailly.com/fr" target="blank">site officiel</A> vous en apprendra bien davantage.

Je ne vais pas y aller par quatre chemins, et je sais que je ne me ferai pas beaucoup d'amis sur ce coup-là mais... je me suis ennuyé ferme avec ce vin. J'ai tourné et retourné cet article dans tous les sens, ne sachant pas trop comment aborder la chose. Oui, ce 2010 est techniquement proche de la perfection. Son point fort est un équilibre en bouche sans faille avec pourtant des tanins massifs et innombrables, une acidité moyenne contre-balancée par un alcool parfaitement intégré donnant lieu à une impression veloutée ou de sucrosité au fur et à mesure que le vin tapisse le palais. Et la conséquence de cet équilibre, c'est une finale d'une longueur peu commune, proche de la minute dès l'ouverture de la bouteille. C'est tout ce que je retiendrai. Pourtant c'est formidable, me direz-vous? Qu'est-ce que je pourrais bien vouloir de plus? Sauf que sur les 48 heures passées avec cette bouteille, je n'ai pas vibré une seule fois, pas un frisson, pas un "wow", pour la bonne et simple raison qu'il n'y a pas d'âme, pas de magie. L'aromatique est désespérément classique avec un nez très moyennement expressif. Elle se décline sur un boisé déjà très bien fondu, un peu de fruit noir type framboise, et des notes à caractère végétal typique du cabernet qui n'apparaissent qu'au bout de 24 heures, un peu comme si le maquillage s'effritait.

Évidemment, c'est un vin conçu pour une garde de compétition et bien sûr, je l'ai ouvert à peine sorti de l'oeuf. Sauf que tout grand vin taillé pour la garde offre des étincelles, un mode de lecture qui donnera déjà un certain plaisir immédiat (soit impressionnant, soit émouvant) et surtout donnera envie de l'encaver. Ce sera sans moi sur Haut-Bailly. J'aurai peut-être un tout autre avis si je devais le regoûter en 2030, mais je n'en suis pas du tout certain.

Tout cela n'aurait guère d'importance si ce vin était vendu à un prix convenable, que je situe entre 25 et 30 euros dans ce cas précis. Sauf que ce cru classé de Pessac-Léognan allégera votre bourse de plus de 100 euros, avis aux amateurs.

Pourtant dieu sait si j'aime les vins de Bordeaux. Pour rester sur la même appellation, le Château de Fieuzal m'a littéralement fait décoller du sol sur son millésime 2010, dégusté sur un salon après un déjà merveilleux 2012 (qu'on trouve à moins de 30 euros, d'ailleurs). J'ai également beaucoup d'affection pour le blanc de Pessac en provenance du Château Carbonnieu. Malartic Lagravière, un peu plus cher, mérite également qu'on s'y intéresse. Sur Saint-Estèphe, j'ai éprouvé beaucoup d'émotions avec un Phélan-Ségur 2012 tout en finesse. Donc même jeune les grands vins de Bordeaux peuvent dégager une superbe personnalité. Mais quand on se permet de vendre pour 118 euros l'unité, (déjà un peu moins cher qu'en primeur si mes informations sont bonnes... désamour?), il s'agit d'offrir autre chose qu'un vin technologique au look de "premier de la classe". Je ne fustige pas tous les vins à 3 chiffres, mais j'insiste uniquement dans ce cas précis, il y a vraiment de quoi.

Pour terminer sur une note plus positive, vous trouverez une large sélection de Bordeaux, prestigieux ou pas, chez <a href="http://www.magnuswijnen.be/" target="blank">Magnus Wijnen</A>, encore une adresse hautement recommandable et pas seulement pour cette région vitivinicole!

Ma note globale: 82/100. Le prix étant un critère secondaire dans l'attribution de ma note, j'aurais pu être bien plus sévère étant donné l'indécence de celui-ci. Enfin, puisque je me dois de rester objectif, notez tout de même que les pros, Robert Parker ou James Suckling par exemple, lui donnent allègrement 98/100. Alors je ferais sans doute mieux de la boucler, non? ;-)

jeudi 5 février 2015

Quitou.com, pack 2: le blanc à l'honneur

Bienvenue pour ce compte-rendu de dégustation chardonnesque, deuxième face à face proposé par le site Quitou.com. Deux blancs français mais de coins différents vont tenter de nous livrer leurs secrets, cet épisode nous propose d'apprivoiser ce caméléon de cépage qu'est le Chardonnay.

A ma gauche, l'Artisan 2012, un Chardo languedocien. Sous la bannière de Laurent Miquel, on trouve deux vastes propriétés, Cazal Viel dans la zone d'appellation de Saint-Chinian, et Les Auzines, plus bas sur Corbières. Cela donne lieu à une kyrielle de vins différents de toutes les couleurs, classés en diverses gammes: les vins d'appellations, les mono-cépages, ... J'ai aperçu qu'on y produisait un Albarino en feuilletant le site web de la maison, voilà qui attise ma curiosité. Mais revenons plutôt à ce 100% Chardonnay, qui, toujours selon le site officiel, a été élevé pour moitié pendant 5 mois en barrique. La dégustation me fait penser à 18 mois plutôt qu'à 5, mais soit!

A ma droite, le Mâcon-Fuissé 2012 du Château Vitallis. L'appellation permet de situer aisément ce domaine au sud de la Bourgogne, sur les communes de Fuissé et Solutré. Denis Dutron n'y produit à priori que du blanc, deux Pouilly-fuissés, un Saint-Véran, et du Crémant. Mais c'est en l'occurence le Mâcon-Fuissé qui nous intéresse ici, c'est d'ailleurs le premier que j'ai la chance de déguster, je manque donc de références. Ce vin est produit à partir de vignes trentenaires et est élevé en cuve.

Je ne vous fait plus languir, voici ce que j'ai pensé de la cuvée "L'Artisan": élevage très intrusif au départ, on ne sent quasi que du bois au nez, j'ai l'impression que je vais croquer la barrique qui a couvé ce vin. En bouche, un peu de banane, de poire et de fleurs sucrées parviennent à surnager à travers les planches. Ce qui est un peu plus intéressant, c'est que l'attaque se fait très moelleuse, beaucoup de gras pour commencer, avec pourtant une pointe inattendue de fraicheur en finale. L'alcool est bien intégré donc on est loin d'être sur un vin pataud. La finale est de longueur moyenne, sur des notes de caramel et apporte une légère amertume bien agréable. Après quelques heures, en terme d'arômes je parviens enfin à mettre un nom qui se rapproche d'un parfum bien particulier, un peu chimique. Vous savez, ces petits bonbons à croquer en forme de pastilles... on en trouve certaines variantes sous la forme de colliers. C'est original.

Et du côté du Mâcon-Fuissé alors? Le nez du bourguignon est un peu moins exubérant mais plus racé, sur des notes d'agrumes (pamplemousse) et de beurre-citron, il annonce beaucoup de fraicheur et j'ai l'impression que ce vin peut permettre de bien jolis accords à table. Derrière ces agrumes se faufilent une ou deux pommes vertes. En bouche ça se confirme, belle acidité même si on est loin de Chardonnays tranchants comme on en trouve davantage au nord de la Bourgogne. Un petit peu de gras s'installe en milieu de bouche avec sa couronne de fleurs parfumées. L'alcool est un peu plus ressenti en finale mais rien de dramatique. C'est juste un peu surprenant, étant donné les climats différents et l'origine de ces deux vins, on aurait pu s'attendre au contraire à ressentir davantage l'alcool sur le Languedocien. La finale est de longueur assez moyenne, sur des notes vaguement miellées.

Je constate avec joie que les deux vins n'ont quasi pas bougé sur deux jours. Le sudiste s'est même amélioré, il a gagné en longueur finale, le nez s'est orienté vers des arômes un peu plus sucrés type grenadine. Si le vin du Languedoc est probablement à boire pour ce qu'il est maintenant ou dans les deux-trois prochaines années, le Mâcon-Fuissé pourra supporter voire bénéficier de quelques années de plus en cave si on le souhaite. Ce qui est important à retenir avec cet exercice, c'est la différence entre élevage en cuve et élevage en barriques. Lorsque ce dernier est bien réalisé et à petite dose, cela peut vraiment apporter un plus en terme de structure au vin, donc je ne suis pas aussi catégorique comme peuvent l'être certains contre le bois, il faut simplement éviter que celui-ci domine et étouffe la matière, ce qui rend généralement le breuvage ennuyeux. J'ai néanmoins aimé l'originalité de "l'Artisan", et je remonte légèrement ma note suite à ces améliorations relativement inattendues. mais j'ai davantage vibré avec le Mâcon-Fuissé. Son prix de 10,90 EUR en fait une affaire plutôt intéressante.

A défaut de coup de coeur ultime jusqu'à présent, ces dégustations comparatives sont décidément fort enrichissantes! Stimuler les nasaux sur deux verres côte à côte, ça aiguise les sens. A quand un comparatif entre Puligny et Chassagne? Bon d'accord, je me tais... ;-)

Ma note globale: Artisan 2012: 77/100, Mâcon-Fuissé 2012: 84/100

Le troisième pack concerne les bulles, miam, avis aux amateurs!